Travailleurs sans ressources… mais « Tout va bien » !

 

Une lectrice nous écrit:

 

« Le président de la République vient de nous rassurer sur son état de santé : « Tout va bien » !

 

Dans leur piaule de 10m2 sous les toits, sans chauffage ni fenêtre, Lili 20 ans et Claude 22 ans se préparent à subir leur humiliation quotidienne : se rendre à la distribution gratuite de repas chauds.

 

Travailleurs précaires, ils n’ont plus de ressources.

 

Depuis des semaines ils survivent en se nourrissant de riz et de galettes à base de farine et d’eau qu’ils confectionnent sur leur petit réchaud de camping.

 

Ils passent des journées sans sortir, pelotonnés sous la couette pour lutter contre le froid et l’humidité.

 

Par-dessus leurs gros pulls, ils ont enfilé anoraks et bonnets avant d’emprunter l’escalier, la faim au ventre.

 

Sur le palier du 3ème étage, ils croisent un voisin qui revient d’Intermarché avec un cabas bien rempli. Ils le saluent en baissant les yeux, honteux.

 

Jamais ils n’auraient pensé tomber aussi bas, aussi vite, ni imaginer qu’un jour ils devraient mendier un repas dans cette petite ville clinquante de lumières et d’illusions.

 

Lili a perdu son emploi de serveuse, elle n’a pas droit au chômage, lui travaillait chez un fleuriste qui a fermé.

 

Ne pouvant en payer le loyer, ils ont dû quitter leur petit studio pour cette chambre de bonne minable qu’un ancien collègue de travail de Claude leur a fait avoir, sinon ils seraient à la rue.

 

Au moment où ils sortent dans cette nuit glaciale, six étages plus bas, une patrouille de police arrive vers eux.

 

Contrôle d’identité. Auraient-ils l’air de dangereux terroristes ?

« Non, ricane le chef, mais avec vos tenues, je me disais que vous étiez peut-être en train de tenter une évasion pour aller skier en Suisse ».

 

Claude serre les poings.

 

Surtout ne pas résister, ne pas perdre de temps, sinon le camion de l’association qui nourrit les naufragés de la crise ne sera plus là à leur arrivée. De longues secondes s’écoulent…

 

« Allez les jeunes, ça ira pour cette fois ! Mais n’oubliez pas : demain, couvre-feu à 20 heures pétantes! » lance le gradé qui ironise devant ses collègues hilares, avant d’ajouter « faites pas les cons sur le télésiège et profitez bien de votre raclette ! »

 

Lili et Claude filent sans demander leur reste.

 

Là-bas, dans la zone industrielle près d’un bâtiment désaffecté, à la sortie de la ville, loin du centre, comme pour éviter aux bien pensants de voir cette misère, des silhouettes anonymes se pressent autour de la camionnette du Secours Populaire d’où émane une bonne odeur de soupe, ce qui – dit-on – dérange certains riverains.

 

Une passante au manteau de fourrure et son mari ventripotent qui traine en laisse un pékinois revêtu d’une veste fluo, les interpellent :

« Regarde-moi ces feignasses qui vivent aux crochets de nos impôts. Ce pays encourage vraiment les branleurs, ils ont qu’à travailler… Pauvre France ! »

 

Dans la file d’attente, on fait semblant de ne pas avoir entendu. Lili a les larmes aux yeux, une boule d’amertume au creux du ventre, elle serre si fort les poings à s’en faire saigner.

 

Se taire et subir sans se révolter, n’être plus qu’une ombre parmi les ombres sans autre espoir que tout cela se termine – d’une façon ou d’une autre –

 

Ils sont des milliers, comme nous dans tout le pays.

Pas des SDF, juste des gens essorés par le système, au bout du rouleau, qui attendent que l’escalier grippé de l’économie se remette en marche.

 

On est le 24 décembre 2020. On distingue au loin la lueur des guirlandes qui décorent le centre ville, ici il fait froid et noir.

« Tout va bien »….

 

Lili

 

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